Les médecins de l'armée et les soins aux Colons en Algérie (1848-1851)
Dans les premières décennies de la conquête en Algérie en 1830 se pose la question de la possibilité d'y installer une population européenne. La force avec laquelle les maladies déciment le corps expéditionnaire et les colons rend en effet cette implantation problématique, surtout au milieu du XIXe siècle, quand la République, en 1848, organise la venue de 12 000 colons, qui viennent compléter une population rurale française d'environ 20 000 personnes.
Le contrôle sanitaire de ces nouveaux villages est essentiellement effectué par des médecins militaires. Ils sont les témoins de leurs difficiles débuts et notamment de la forte mortalité de populations urbaines peu habituées à leurs nouvelles conditions d'existence. Ces difficultés posent la question de l'acclimatement, diversement appréciée par les médecins. Les rapports des médecins de l'armée esquissent le paysage sanitaire en train de naître en Algérie.
Y domine, particulièrement dans les campagnes, le médecin militaire, aux côtés duquel travaillent aussi des médecins civils, des sœurs de charité et des sages-femmes. Outre la mise en place d'un cadre matériel et humain, les rapports des officiers de santé précisent la manière dont les médecins organisent leur service médical, la fréquence des visites et la manière dont elles se déroulent, éclairant un pan de l'histoire de la médicalisation au XIXe siècle

" L'histoire des possessions d'Afrique est presque exclusivement médicale " (Antonini, 1841, 51). C'est ce qu'écrit, dans un rapport de 1841, le médecin en chef du corps d'occupation en Algérie Antonini. La force avec laquelle les maladies déciment le corps expéditionnaire et les populations européennes qui commencent à s'installer dans la colonie africaine rend cette implantation problématique. La question se pose de manière particulièrement aiguë au milieu du XIXe siècle, lorsque la République ouvre, par le décret du 19 septembre 1848, un crédit de 50 millions de francs au ministère de la Guerre sur les exercices 1848-1850, pour établir 42 colonies agricoles.
Après l'échec de la colonisation libre en Algérie, c'est la colonisation officielle qui prend le relais, elle-même envisagée de différentes manières. La colonisation militaire prônée et tentée par Bugeaud au cours des années 1840 ayant fait long feu, s'y substitue la colonisation " avec le concours des militaires " (Kateb, 2001, 86), encouragée par Paris qui voit dans l'Algérie un des moyens de régler la question sociale. Le projet de septembre 1848 prévoit ainsi la venue de 12 000 colons volontaires, installés aux frais de l'État et devant recevoir une concession, une maison, des instruments, du bétail, des semences, des rations journalières de vivres, pendant les trois premières années durant lesquelles ils dépendraient de l'autorité militaire. Alors que l'Algérie ne compte qu'une cinquantaine de villages de colonisation peuplés d'environ 20 000 personnes, sur une population évaluée en 1847 à quelque 110 000 Européens, cette mesure entraîne donc une forte augmentation de la population coloniale en zone rurale (voir carte). Plusieurs travaux retracent l'histoire de ces colonies de 1848 et tous témoignent des difficultés d'adaptation des colons, pour beaucoup des artisans parisiens (1). S'ils relatent le " calvaire " de ces volontaires, dévorés par les fièvres et décimés par le choléra, rares sont ceux qui mentionnent la présence de médecins à leurs côtés. Le contrôle sanitaire des nouveaux villages est en effet essentiellement effectué par des médecins militaires, qui ont laissé des témoignages sur les débuts douloureux de cette opération. Ils offrent également une perspective originale sur ce mouvement d'implantation spécifique, celle d'une colonisation qui apparaît largement médicalisée, élément essentiel pour la suite de ce processus.

LES MÉDECINS MILITAIRES, TÉMOINS DE LA DIFFICILE INSTALLATION DES COLONIES AGRICOLES DE 1848 (2)

Au cours de la IIe République, l'armée d'Afrique poursuit la conquête de l'Algérie, notamment dans les oasis du Sud-Est et en Kabylie. Sur les territoires antérieurement conquis et réputés pacifiés, c'est la mission colonisatrice qui prime (Bertaud et Serman, 1998, 289). L'encadrement des colonies agricoles en est une illustration exemplaire.
Le 11e convoi de colons prévu par le décret de septembre arrive à Bône le 3 décembre 1848. Quelques jours plus tard, 1100 d'entre eux se dirigent vers Mondovi, où deux centres de population vont être formés. Un bataillon les accompagne et avec lui, le jeune sous aide Boyer, muni d'une " commission provisoire " et de deux cantines renfermant les médicaments " que l'autorité médicale avait jugés les plus indispensables " (Boyer, 1851, 6). L'arrêté du 17 novembre 1848, qui détaille l'installation des colons, précise en effet qu'un service de santé sera organisé dans chaque village. Jusqu'à l'arrivée de médecins civils, dont l'effectif limité est alors concentré dans les villes principales, il sera effectué par des officiers de santé militaires détachés des hôpitaux militaires ou des corps. Les malades qui ne pourront être traités sur place seront transportés dans les hôpitaux militaires ou civils selon les localités. Forts d'une expérience de plusieurs années sur le terrain algérien, les médecins de l'armée semblent parfaitement convenir à cette mission. Pierre Fontez, sous-aide aux ambulances de l'armée d'Afrique, est ainsi chargé, " à cause de son ancienneté en grade, de ses bons services et surtout de son long séjour en Algérie, de recevoir à Cherchell 1500 colons destinés à peupler les colonies agricoles de Novi, de Zurich et de Marengo, et de protéger leur santé contre les influences d'un sol tout nouveau pour eux " (Fontez, 1852, 5). Plusieurs jeunes médecins, plus ou moins expérimentés, servent ainsi dans les nouveaux centres agricoles. Désignés par l'autorité militaire, ils peuvent aussi être volontaires, à l'instar de l'aide-major Labouysse qui " a lui-même demandé cet emploi [à Ponteba] avec la résolution de s'y consacrer en entier (3) ". La mission présente des avantages : " C'était la première fois que j'étais chargé d'un service sous ma responsabilité personnelle " (Boyer, 1851, 8 ; Driard, 1852, 17), note Boyer à Barral. Quelques-uns soulignent également la possibilité, dans ce cadre, de suivre des populations diverses, civiles et militaires. Boyer, par exemple, raconte comment, pendant deux ans, il soigne aussi bien les troupes que des ouvriers civils employés aux constructions et des colons (Boyer, 1851, 7).

Outre les soins aux populations coloniales, les médecins de l'armée cherchent à établir une statistique médicale pour chacun des centres, selon les prescriptions définies par la circulaire du 9 février 1849. Mais la tâche est difficile en raison de la rapidité avec laquelle les praticiens se succèdent dans les villages. À La Ferme par exemple, " le service de santé a été fait en premier lieu par MM. les chirurgiens sous-aides de l'hôpital d'Orléansville. Ils le prenaient à tour de rôle, chacun pendant un mois. Il a été fait ensuite par M. Baradoux, chirurgien aide-major au 16e régiment de ligne, puis par MM. les sous-aides de l'hôpital de nouveau, plus tard par M. Leuret, chirurgien major au 16e ; il est aujourd'hui confié à M. Vigier, chirurgien aide-major au même régiment. Il le fait depuis huit jours. Des mutations aussi fréquentes ne permettent pas de suivre dans ses progrès l'acclimatement des colons et quel que soit le zèle et l'instruction de chacun, il doute qu'il puisse se former une méthode générale de traitement. Une chose peu suivie n'est jamais prise à cœur (4) ".
Les inspecteurs médicaux de l'armée, lors de leurs tournées, déplorent donc souvent que le médecin en charge des villages n'ait pas trouvé établi, à son arrivée, le registre d'inscription des maladies comme à Aïn Tedeles et Souk-el-Mitou, " ce qui l'a mis dans la nécessité de remplir ses états avec des documents puisés dans les registres du directeur de la Colonisation (5) ", déplore Mialhes. La nécessité d'organiser correctement cet enregistrement est soulignée, afin de contribuer à la réalisation d'une statistique nosographique. Michel Lévy propose, en 1851, la centralisation des rapports concernant le service civil, celui des hôpitaux militaires et des corps de troupe, afin de faire ressortir " par trimestre et par année, les résultats généraux de la maladivité [sic] et de la mortalité en Afrique (6) " dans les populations civiles et dans l'armée.
Avant même que cette centralisation ne soit réalisée, les médecins établissent leurs propres comptages qui racontent pour la plupart la même histoire, celle d'un désastre sanitaire. En octobre 1851 par exemple, dans le nouveau village de Ponteba, qui comptait 335 habitants en 1848, moins de 200 habitants sont recensés (7).

Citant le rapport que Louis Reybaud rédige à l'automne 1849 après sa tournée dans les colonies agricoles et dans lequel il constate la forte morbidité des colons, Boyer rajoute que l'inspecteur n'avait pas encore connaissance du chiffre de la mortalité qui, " pour plusieurs de ces colonies, dépasse 200 pour chacune d'elles " (Boyer, 1851, 59-60). En août-septembre 1849, les registres de l'hôpital de Guelma indiquent pour deux mois 400 malades et 132 décès de colons venus fonder les centres agricoles d'Héliopolis, Millesima et Petit (Prieur, 1853). Tous soulignent ainsi la mortalité " excessive " (Fontez, 1852, 19) qui s'abat alors sur les colons : dans la colonie de Castiglione, le médecin Rouis l'évalue à un décès pour 27 habitants soit " un tiers plus considérable que celui de la France continentale où il n'y a qu'un décès sur 40 habitants ". Louis Laveran compte un décès sur sept habitants à El Afroun (8) et Drapier, après avoir calculé une moyenne de décès dans la population civile en Algérie de 44‰ entre 1842 et 1846 pour un taux de mortalité en métropole de 23,6 ‰ et relève que la mortalité des colons de 1848 est trois fois plus forte qu'en France, malgré l'absence de vieillards (Drapier, 1850, 11 et 24).
Mortalité et morbidité atteignent donc des sommets dans les premières années d'existence des colonies agricoles et aboutissent aux baisses d'effectifs rapides constatées dans plusieurs d'entre elles. Cette diminution est également due au nombre de " renonciataires " (Fontez, 1852, 9). Après six mois de présence, 1110 colons avaient abandonné l'Algérie, " un grand nombre sans motifs connus, d'autres pour raisons de santé et 3188 individus avaient été contraints d'entrer à l'hôpital " (Drapier, 1850, 24).
Une fois les forts taux de mortalité et de morbidité des colons constatés, les médecins s'emploient à les expliquer. Dans les colonies agricoles, résume le médecin Duprat, tout " conspire contre la santé : alimentation presque toujours mauvaise, malpropreté des lieux, des habitations et des hommes, boissons frelatées et dangereuses ; empoisonnement maremmatique permanent provoquant des fièvres, des dysenteries endémiques ; eaux très mauvaises " (Duprat, 1850, 12). L'emplacement d'un centre de colonisation, dont l'environnement géographique et géologique est souvent décrit avec minutie, peut entraîner sa mauvaise situation sanitaire. En ces temps de renaissance néo-hippocratique, qui doit d'ailleurs beaucoup aux travaux des médecins militaires, il est tenu pour certain que les maladies varient selon la nature des terrains (Osborne, 1998, 185-204). C'est pourquoi, résume Quesnoy, " dans la province d'Oran, où le sol est sec, les affections, qui tiennent essentiellement au climat, les diarrhées, les dysenteries, les gastrohépatites sont en majorité ; dans la province de Bône au contraire, le sol est humide, les marais nombreux et les maladies amenées par le dégagement des miasmes comme les fièvres de tous les types et leurs complications se comptent en grand nombre (9) ".

Le choix des localités est donc " la chose la plus importante dans la nouvelle création (10) " et, en 1842 déjà, Bugeaud confiait au médecin en chef de l'armée, Antonini, un travail d'ensemble " qui avait pour but l'installation rationnelle de la population coloniale " (Cabrol, 1863, 1).
En 1848, la position des nouveaux villages est fixée au ministère d'après les cartes du Dépôt de la guerre. Dans l'ensemble, concluent plusieurs officiers de santé, " il y a peu à blâmer dans l'emplacement des villages ", presque tous placés sur des terrains élevés permettant un écoulement facile des eaux. Quelques uns malgré tout " empruntent dans les qualités du sol ou dans l'existence de marais dans leur voisinage des causes de maladies qu'il n'est peut être pas impossible de faire disparaître (11) ". Ainsi, Marengo, situé à 8 km de la mer et à 1 500 mètres d'un marais, fournit plus de malades que les autres, comme Saint-Louis, " situé dans un bas-fond (12) ". Au contraire, la " bénignité et la variété exceptionnelle des maladies de Assi bou Nif semblent tenir à la position topographique du village qui rapproche son climat de celui de beaucoup de localités du midi de la France (13) ".
Quelques médecins, cependant, estiment que dans plusieurs villages, " on a trop souvent sacrifié la position hygiénique à la position militaire, et ils se trouvent placés sur des points aussi irrationnels que malsains " (Roudet, 1852, 17). Fontez met aussi en garde ceux qui, s'appuyant sur des données pas toujours exactes bâtissent des villages " sur des cartes " sans écouter la science des personnes compétentes : Novi par exemple " eût été incontestablement mieux placé à 500 m plus loin du rivage ; c'était l'avis du médecin qui fut consulté à l'époque […] mais on n'en tint pas compte ". Il en a été de même à Zurich et le village, bâti sur les bords de l'Oued-el-hachem, connaît une humidité permanente : " Aussi, depuis 1848, la mort a-t-elle moissonné bon nombre de colons " (Fontez, 1852, 15, 16, 9). Estimant également que ce n'est pas " à distance " qu'il sera donné de connaître l'emplacement " le mieux approprié à l'assiette d'un centre agricole " au point de vue hygiénique, les médecins Martin et Foley appellent à ce que de telles tâches soient confiées " à des hommes pratiques qu'une longue expérience du pays a initiés à sa topographie et à l'exacte notion des influences locales actuellement capables de nuire " (Martin et Foley, 1851, 258). Pour Prieur par exemple, un bon moyen de choisir un emplacement salubre consiste à se fixer aux alentours de ruines romaines, " indice d'une situation plus saine que les autres " (Prieur, 1853, 26).
Si la situation du village peut être incriminée dans la production des maladies, le travail de colonisation lui-même est présenté comme une cause de morbidité.

Plusieurs médecins expliquent ainsi l'importance des fièvres par les grands remuements de terres caractérisant les premières années de l'installation. Ernest Vézien, qui a servi dans les colonies agricoles a pu se convaincre, comme d'autres, " des dangers inséparables de l'établissement d'une colonie dans ce pays et du défrichement des sols vierges (14) ". Le processus de colonisation agricole porterait donc en germe les limites de la colonisation. Souvent avancée pour comprendre la situation sanitaire dans les villages, cette raison n'est cependant pas unanimement adoptée. Drapier relève en effet que " les colons n'ont rien défriché ; les dangers de cette opération ont pesé sur les soldats qui, avant l'arrivée des colons, avaient été chargés de préparer le sol en payant de leur santé […] ce travail préalable " (Drapier, 1850, 24).
Les médecins jugent également de l'hygiène publique. D'après les ordres des directeurs, chaque colon " doit balayer le devant de son habitation et les immondices rassemblés en tas sont ensuite enlevés par des préposés ad hoc (15) ". Louis Laveran souligne que les eaux d'irrigation dans les fossés bordent les rues du village d'El Afroun et forment de véritables marais artificiels dont il faut se méfier (16). L'habitat aussi constitue un point essentiel de l'hygiène et tous les écrits sur les colonies agricoles relèvent les conditions de logement déplorables qui marquent leurs débuts : tentes et mauvais baraquements d'abord, des " logis de carton " dont se souvient le colon Eugène François (Rasteil, 1930, 55) ; puis se montent des maisons en dur, proposant des logements que l'inspecteur Loyer dénonce en 1849 comme " trop bas et trop étroits pour loger de grandes familles (17) ". Outre l'encombrement, Boyer estime que les " vices " de ces logements sont la cause prédisposante la plus puissante de l'épidémie d'ophtalmies purulentes contractées sous l'influence des courants d'air, de l'abaissement de la température et des froides rosées de la nuit. Que de fièvres, que de diarrhées, d'engorgement des membres inférieurs, qui n'ont pas d'autre origine
" (Boyer, 1851, 38). Ces maisons ne possèdent " nulle part ni caves, ni greniers, ni cuisines, ni latrines et des plantations d'arbres autour des habitations seraient d'un immense avantage pour le maintien de la salubrité (18) ". De plus, à quelques exceptions près, les logements des colons sont mal tenus et " beaucoup sont remplis d'animaux domestiques qui ajoutent à leur malpropreté naturelle (19) ". Sont ainsi inextricablement liées hygiène publique et hygiène individuelle des colons, centre d'intérêt des médecins qui en étudient divers aspects. Alimentation, vêtement, mode de vie, rien n'échappe à la plume du médecin, qui répercute également les évolutions pouvant rendre, au cours des années, la vie dans les colonies moins difficiles.

Goze relève par exemple, en 1851, que les choses ont bien changé depuis son inspection deux ans auparavant. À Novi, " l'aspect du village qui est proprement tenu est satisfaisant ; toutes les rues sont faites en chaussée et ont été macadamisées par les colons, avec une forte couche de cailloux de rivière (20) ". De même, l'alimentation, d'abord fournie par l'administration est décrite comme très monotone. Ce régime s'améliore progressivement mais " ces commodités de la vie n'ont pu venir que tard, et c'est dès le début qu'elles eussent été plus nécessaires " (Boyer, 1851, 23). Quelques médecins se plaignent de l'insuffisance de la ration, notamment pour les enfants et y voient " une des causes de la dépopulation (21) " constatée. Cependant, la population des colonies commence à croître, une tendance présentée comme le résultat de l'envoi de nouveaux émigrants, " mieux choisis " (Prieur, 1853) que ceux de 1848. Une des causes de l'échec initial des colonies agricoles tiendrait en effet à la composition de leur population. Qu'attendre d'une population, demande Boyer, dont " les deux tiers étaient de constitution lymphatique, d'une constitution faible, souvent débilitée et d'un âge où l'acclimatement est, sinon impossible, du moins fort douteux " ? Qu'attendre aussi d'une population qui, " sur 458 individus dont elle se composait à son arrivée, ne comptait que 150 chefs de famille ou célibataires, presque tous ouvriers d'art. […] De ce nombre, 10 à peine étaient habitués aux rudes travaux des champs " (Boyer, 1851, 29-30). Pour remédier à ce problème, la loi du 20 juillet 1850 stipule que les colons destinés à compléter les villages fondés en 1848 seront désormais choisis par les Conseils de préfecture parmi les soldats libérés du service ou ayant servi en Algérie et les cultivateurs mariés d'Algérie ou de France (22). L'origine géographique du colon a son importance : les Méridionaux étant censés " s'acclimater vite dans le nord de l'Afrique " (Martin et Foley, 1851, 252), un arrêté ministériel de 1844 établit déjà que, " dans l'intérêt de la santé des colons, la délivrance des permis de passage gratuit serait suspendue du 1er juin au 1er octobre pour les habitants des zones septentrionales de la France et de l'Europe " (Martin et Foley, 1851, 256).

LES MÉDECINS, PARTISANS OU ADVERSAIRES DE LA COLONISATION ?

La forte mortalité des populations européennes en Algérie pose ainsi de manière particulièrement aiguë la question de la possibilité de l'acclimatement. Le monde médical se demande, dans le cadre d'une interrogation plus vaste sur l'adaptation de l'homme dans les climats chauds si l'Européen et plus particulièrement le Français peut se naturaliser comme agriculteur en Algérie. D'un côté, le médecin militaire Boudin est l'un des adversaires les plus convaincus de l'acclimatement et par suite, de la colonisation. En 1848, au moment où l'Assemblée nationale discute du sort de l'Algérie, il cherche à réduire " à sa juste valeur l'opinion qui s'efforce depuis quelques temps à faire considérer comme chose démontrée l'acclimatement du Français à l'état d'agriculteur dans la partie basse de l'Algérie " (Boudin, 1848, 1). Il proteste contre ceux qui, comme Martin et Foley, entendent poursuivre la colonisation d'un pays " qui coûte à la France déjà plus de 1,4 M de francs et plus de 100 000 soldats ; qui lui a coûté, en 1846, plus de 100 millions de francs et plus de 7000 combattants ; pays sans commerce et sans agriculture, dans lequel la mortalité de l'Européen enfant et adulte, militaire et civil, s'élève à un chiffre fabuleux ! et vous demandez que l'on vous prouve que l'opération est impossible ! " (Boudin, 1848, 19). Ces arguments, à la fin de la Monarchie de Juillet, auraient déjà " subjugué plusieurs esprits et paralysé momentanément l'impulsion colonisatrice " (Martin et Foley, 1848, 4). Mais Boudin aurait vu s'élever contre lui à peu près la totalité des médecins " qui ont observé en Algérie " (Topin et Jacquot, 1849, 5). Pour ses détracteurs, il confondrait l'influence propre au climat et les causes accidentelles, tenant de l'hygiène :
" Sous le rapport de son climat, l'Algérie n'a rien qui soit essentiellement nuisible à la santé [...] si nous avons eu beaucoup de maux à déplorer, ils étaient presque tous dus à des causes accidentelles que la main de l'homme peut atteindre et éteindre (23) ", assure Quesnoy. Certes, si l'on ne s'habitue pas au miasme, il est néanmoins possible de transformer l'Algérie en pays salubre, par " un combat qu'il faut livrer à la nature (24) ". Le pays, en se transformant, devrait permettre finalement qu'y prospèrent des populations coloniales.
L'acclimatement est possible, mais il s'agit d'un processus encadré par la médecine, à qui il revient, " sentinelle avancée des colonisations européennes dans les pays chauds, d'éclairer la route et de guider les premiers efforts du législateur ", estiment Martin et Foley (Martin et Foley, 1848, 4). Pour réussir, la colonisation " dépend de l'étroite et constante combinaison des efforts de l'administration et des particuliers ". L'État s'engageant à de lourds sacrifices, les colons ont envers lui " des devoirs de plus d'un genre à remplir. C'est souvent pour les avoir oubliés qu'ils se sont perdus, qu'ils ont compromis en même temps leurs intérêts, leur vie et la cause de la colonisation ". Depuis les débuts de la conquête, " ce sont moins les influences climatériques que l'omission ou l'inobservance de certaines mesures hygiéniques qui ont été la cause des sinistres qu'on a eu à déplorer " car les colons ont apporté d'Europe, " sans y vouloir rien changer, une hygiène qui n'était plus en harmonie avec la latitude plus chaude de l'Algérie " (Martin et Foley, 1851, 222), alors que l'Européen, doit " prendre pour modèle les indigènes ; s'informer de leurs habitudes, de leurs mœurs, de leur genre de vie, pour y conformer la sienne " (Boyer, 1850, 55).

Quesnoy prescrit notamment aux cultivateurs de l'Algérie " des ablutions journalières et de fréquents bains généraux ", s'appuyant sur le témoignage des anciens Romains " et ce qui se passe tous les jours sous nos yeux chez les Arabes (25) ". Le médecin a donc un rôle de conseil mais les responsabilités du colon en matière sanitaire, liées à la pérennisation du projet colonial, sont aussi régulièrement rappelées.
Les chiffres officiels, qui indiquent la diminution du nombre de malades civils traités dans les hôpitaux civils et militaires entre 1849 et 1851, sont présentés par les autorités comme la preuve que les travaux de desséchement ont amélioré les conditions sanitaires de la colonie et que l'acclimatement des populations agricoles est en voie de progrès (ministère de la Guerre, 1853, 121), ce que continue de récuser Boudin : " Dans les colonies agricoles, la mortalité annuelle de la population européenne en 1850 et 1851 a dépassé 98 décès sur 1000 hab. ; en d'autres termes, la population a été décimée " (Boudin, 1853, 29). En 1851 cependant, l'inspecteur Rietschel relève que l'état sanitaire des colons de Montenotte est " meilleur qu'on ne l'espérait d'après l'expérience des maladies éprouvées par les soldats dans des lieux occupés pour la première fois des résultats qui modifieront peut-être les idées récentes sur l'acclimatement des Français en Algérie (26) ". D'après le médecin Marcel Sierzputowski, plusieurs contrées de l'Algérie colonisées seraient en 1851 " dans des conditions sanitaires telles que positivement, elles peuvent s'assimiler à la France (27) ". Optimiste, ce constat souligne la mise en place progressive d'un dispositif sanitaire à grande échelle sur le territoire de la colonie en voie d'organisation.

LE PERSONNEL SOIGNANT, OUTIL DE LA COLONISATION

Les questions d'hygiène sont essentielles parce que, écrit Pierre Fontez, " il y va de l'avenir de nos colons et de la conservation de nos possessions d'Afrique qui est nécessairement liée à celle de leur santé " (Fontez, 1852, 7). Les maladies deviendront plus rares " si des mesures d'hygiène sont dictées par des hommes de l'art, si aux jours de souffrance, de sains et vastes hôpitaux sont ouverts aux malades, si près d'eux des médecins instruits, expérimentés et dévoués veillent sur la santé de tous, prodiguant au début les soins nécessaires pour arrêter le mal (28 )".
Le médecin est ainsi vu comme un outil de la colonisation : il permet le peuplement des colonies non seulement parce qu'il empêche la population présente de mourir, mais aussi parce qu'il évite que les colons ne " rapportent en France une constitution détériorée et de plus un découragement profond qu'ils communiquent à ceux qui les voient ou entendent leurs rapports (29) ". L'aspect psychologique des soins est aussi relevé par le docteur Paÿn pour qui " la vue d'un homme mourant sans soins est bien capable d'effrayer […] la population d'un village et de paralyser les meilleurs travailleurs ". Il faut donc " donner en Afrique, aux colons, dans les campagnes, des médecins chargés de veiller sur la santé (30) ".
Les soins s'organisent d'abord grâce à un personnel relativement diversifié, mais majoritairement composé de médecins de l'armée, du fait de leur nombre. On compte en effet en 1853, pour 85 praticiens civils, environ 418 officiers de santé militaire (Féry, 1994, 22) (31). Avec l'accroissement de l'armée d'Afrique (108 000 hommes en 1846), hôpitaux et ambulances militaires se multiplient ainsi que les effectifs du service de santé. Au milieu du siècle, il dispose d'un personnel médical représentant à peu près le tiers de l'ensemble des médecins militaires français, 2000 infirmiers et 11 700 lits dans 38 hôpitaux (Bertaud et Serman, 1998, 263) (32).
Grâce à cette densité sanitaire, remarque Barudel, les colons de 1848 " ne furent ainsi jamais privés des services de la médecine (33) ". Le service de santé a d'ailleurs dû satisfaire " à des obligations nouvelles (34 ) ", que Joseph Barudel estime " plus difficiles, plus pénibles que toutes celles qui nous étaient confiées jusqu'à ce jour sur la terre d'Afrique (35) ", en soulignant que dans les villages, le médecin est également chirurgien et pharmacien. Il fait aussi partie du conseil consultatif des colonies mis en place après 1850 et Rouis note enfin en 1851 que " depuis qu'on a cessé d'allouer des vivres en nature, l'attention du médecin a dû se préoccuper d'une surveillance active, à l'égard des nouveaux fournisseurs (36) ".

Ces tâches diverses, parfois nouvelles, provoquent une désorganisation du service militaire, dénoncée par Mialhes. Le personnel des hôpitaux est calculé d'après les besoins du service avant l'arrivée des colons ; or ces derniers ont " augmenté nos besoins et diminué nos ressources. De là résulte que le service hospitalier n'est jamais assuré d'une manière continue et qu'il est même toujours sur le point d'être compromis (37) ". Plusieurs médecins insistent sur le coût militaire de la colonisation, notamment sur " la mesure inique qui fait peser sur l'armée les fatigues et les dangers du défrichement des terres destinées à de prétendus colons français ou étrangers […]. Il est grand temps que l'armée cesse d'être exploitée ", affirme Boudin avec force en 1848 (Boudin, 1848, 20). La colonisation rurale pèse ainsi lourdement sur l'armée et son service de santé. Le service des colonies est donc souvent confié à des officiers de santé militaire du grade de sous-aide ou aide major, c'est-à-dire les médecins les plus inexpérimentés puisque en début de carrière (38). Ce choix est critiqué par la plupart des inspecteurs. Goze par exemple souligne que cette lourde charge est laissée à " des jeunes gens, très méritants d'ailleurs, dont les études ne sont pas terminées, dont la plupart n'ont pas encore passé d'examen près des facultés, qui ne sont point docteurs enfin, exercent illégalement la médecine, livrés à eux-mêmes, seuls, sans contrôle médical, sans guide, au service de colonies dans la composition desquelles se trouvent des vieillards, des femmes et des enfants (39) ".

C'est pourquoi, plusieurs officiers de santé, comme le médecin chef Lagrave, exigent que les médecins des colonies soient tous docteurs en médecine (40). Goze soulève encore le problème des sous-aides qui, en travaillant dans les colonies, cessent d'être sous les ordres de leurs supérieurs hiérarchiques et demande à ce que ces apprentis médecins militaires demeurent, pour des raisons de discipline, sous la direction d'un officier de santé en chef (41). Si les colonies agricoles doivent continuer à avoir un médecin militaire, écrit Vaillant en 1851, il faudrait règlementer l'exécution de ce service et " le subordonner à l'officier de santé en chef de l'hôpital militaire par lequel les rapports seraient vérifiés (42) ". À côté des médecins militaires, des médecins civils dits " de colonisation ", commissionnés par l'administration, dispensent également leurs soins aux colons. L'exercice de cette fonction, instituée au début des années 1840, suscite chez plusieurs de ses titulaires des interrogations quant aux droits et aux devoirs qu'elle exige : " Quels villages dois-je visiter ? Comment dois-je faire mon service gratuitement ou autrement, à qui dois-je mes soins ? Tout le monde peut-il à son gré dans chaque localité dépendant de mon service s'arroger le droit de me requérir ? (43) ", demande en 1849, le docteur Paÿn, qui rédige à l'intention des autorités militaires un texte appelant à la Nécessité d'un règlement pour le service de santé dans les villages.
En créant les médecins de colonisation, écrit le commissaire civil de Sétif, le ministre de la Guerre " s'est proposé d'alléger les officiers de santé militaire qui se trouvaient obligés de donner la majeure partie de leur temps aux malades aisés de la population civile, de mettre à la disposition directe des autorités locales des praticiens spéciaux, d'assurer enfin le service médical dans les centres agricoles qui se trouvent éloignés du chef lieu (44) ".
Or il constate qu'à la longue, les préoccupations que donne cette clientèle payante empêche le praticien de s'occuper des indigents de la ville et rend illusoire les tournées rurales. Aussi les indigents s'adressent-ils à l'hôpital militaire, augmentant la charge de travail des médecins de l'armée. Dans les villes, le médecin militaire peut d'ailleurs cumuler les obligations de son service et les fonctions de médecin civil, comme le fait par exemple Leuret, médecin en chef de l'hôpital militaire de Milianah (45).

En zone rurale se met dès lors en place un dispositif médical dans lequel les populations coloniales sont encadrées essentiellement par les médecins de l'armée. Des médecins civils, engagés dans le cadre de la " médecine de colonisation " lorsqu'ils exercent en zone rurale et dont la position au sein du monde médical colonial en voie de constitution se définit peu à peu, en font aussi partie, ainsi que des médecins civils pratiquant dans les villes. Chargés de l'inspection médicale de l'armée, les inspecteurs médico-militaires jugent également du fonctionnement du service de santé civil. Leurs rapports précisent la diversité du personnel médical civil exerçant en Algérie au milieu du XIXe siècle, composé de médecins et d'officiers de santé français et étrangers (ministère de la Guerre, 1853, 120) (46 ) et apprécient diversement les aptitudes professionnelles et les manières d'exercer leur service de ces confrères civils. À La Chiffa et à la Mouzaïa par exemple, Vergé, un médecin civil qui a exercé plusieurs années à Paris et en province, s'occupe du service médical rural. Il visite tous les deux jours les malades, voire plus souvent " pour des cas urgents (47) ". Le docteur Martin, " commissionné par l'administration, réunit pour remplir ces fonctions les conditions suffisantes de capacité, d'instruction et de pratique (48) " : il envoie régulièrement ses rapports et outre son service en ville, se rend au moins une fois par semaine aux mines de cuivre. À côté des docteurs médecins exercent également des officiers de santé civils, comme Barbier, au Fondouck, dont l'inspecteur reconnaît la valeur. À 62 ans, écrit-il, il " conserve encore assez d'activité pour le service du village. Sans être à la hauteur des connaissances modernes, et sans posséder toute l'instruction théorique désirable, il a de bonnes habitudes pratiques et rend des services réels. On peut en partie attribuer le petit nombre de maladies à la mesure qu'il a prise de visiter tous les deux jours chacune des familles (49) ". De même, l'officier de santé civil Duval, à Mahelma " ne paraît pas dépourvu de connaissances médicales et d'une certaine habitude pratique ". Piaget, en revanche, ne " paraît posséder ni l'instruction suffisante, ni l'habileté pratique ; il est âgé, usé, sourd. Il ne peut inspirer la confiance (50) ".

Michel Lévy, lors de son inspection de 1851, tend d'ailleurs à dévaloriser de manière systématique les médecins civils, peut-être pour mieux imposer son idée d'un nécessaire contrôle par les médecins militaires de l'organisation des soins en Algérie. Ainsi, le médecin de l'hôpital de Philippeville lui semble " peu apte à comprendre les obligations d'ordre, de régularité, des hiérarchies (51) " et à Guelma, il estime que le docteur Durant n'inspirant pas confiance, " les vrais malades ne s'adressent qu'aux médecins militaires et surtout au judicieux docteur Puel ". À Sétif encore, il propose de supprimer le poste de l'officier de santé civil Decoeur, qui n'offrirait pas assez de garantie médicale et de faire faire son service par des officiers de l'hôpital militaire de la ville (52). Vaillant va dans le même sens en rapportant que le R.P. Brumauld, installant un orphelinat dans la ville, demande à l'intendant militaire l'assistance d'un médecin de l'armée " pour assurer à sa nouvelle colonie les ressources de la médecine qu'il ne trouve pas à Bouffarick (53) ".
Outre le problème de la qualité professionnelle des médecins et officiers de santé civils, qui peut refléter les tensions au sein du monde médical, les inspecteurs soulignent les difficultés qu'il y a à contrôler les diplômes des praticiens non français. Lévy a ainsi trouvé à Bône, " sous le nom de sous-aides civils des auxiliaires sans titre médical ou pourvus d'un titre équivoque de provenance étrangère, et qui sont inutiles pour l'exécution d'un service aussi restreint (54) ". Le service médical rural de la 2e circonscription du Sahel d'Alger est, quant à lui, effectué par un certain Camps, sur lequel Vaillant n'a " pu obtenir de renseignements précis d'aucune sorte ". D'origine mahonnaise, ce médecin " s'exprime d'une manière inintelligible et comprend peu la langue française. Il est douteux d'ailleurs qu'il possède un titre légal pour l'exercice de la médecine (55) ". Les habitants lui font si peu confiance qu'ils préfèrent faire appel à un ancien intern de Dely-Ibrahim, pratiquant d'ailleurs lui aussi sans titre légal (56). Vaillant estime en revanche qu'" il y aurait justice à […] augmenter (57) " le médecin de colonisation Sierzputkowski. Bien que, depuis le milieu des années 1840, les médecins d'Alger commencent à s'organiser, dans le cadre notamment de la Société de médecine d'Alger approuvée en 1847, André Agnély, médecin-vaccinateur civil, estime dans son Mémoire sur la situation de la médecine et de la pharmacie civile en Algérie, que la médecine civile dans les villes de l'Algérie, " ne laisse pas moins à désirer que celle des campagnes (58) ".

DU PERSONNEL ET DES LIEUX DE SOINS : UN RÉSEAU SANITAIRE EN VOIE DE CONSTITUTION

Le choix des médecins pour les soins aux civils en Afrique est ainsi un sujet de réflexion fréquent dans les rapports des médecins militaires. Selon l'inspecteur Lévy, l'absence de clientèle lucrative en Algérie exclut la possibilité d'y attirer une élite médicale civile ; c'est pourquoi on observe une " pullulation fâcheuse d'une race mélangée de médicastres, de charlatans, de réfugiés, d'évadés qui trafiquent des titres subalternes ou exotiques (59) ", sur lesquels l'administration ne peut s'appuyer. Il faut donc laisser l'exercice médical aux seuls vrais praticiens du pays, les médecins militaires, au dévouement desquels " il sera pendant longtemps nécessaire de recourir (60) ". Les médecins militaires doivent donc évaluer les ressources médicales de la colonie, dans les villes comme dans les campagnes, afin de prévoir jusqu'à quel point leur présence est indispensable pour donner des soins à une population civile dont les besoins détournent le service de santé de ses tâches. La constitution d'un réseau sanitaire suppose dès lors un personnel que les médecins de l'armée s'emploient à gérer : à Novi par exemple, la suppression de l'officier de santé militaire est envisagée : " il suffira qu'un médecin de Cherchell aille y faire trois visites par semaine (61) " tandis qu'à Philippeville, Lévy appelle au remplacement du civil Mellet par un sous-aide, une mesure effectivement prise à El Arrouch.
De plus, fin 1851, les colons doivent passer de la colonisation subventionnée à la colonisation libre (62). Les médecins de l'armée s'intéressent aussi à cette transition et prévoient la future répartition du personnel soignant. Comme il ne sera possible, selon Lévy, " de fixer dans ces localités lointaines, excentriques, que des médecins de rebut, nous n'hésitons pas à considérer comme fatale la mesure qui consistera à introduire les médecins civils dans les colonies agricoles (63) ". Au sujet de deux centres, Vaillant, moins radical, précise que " quel que soit le régime auquel ils seront soumis prochainement, la présence d'un médecin dans l'un ou l'autre est inutile : il suffit d'un médecin civil à Médéah pour la ville, le dispensaire et les deux villages de Damiette et Lodi (64) ". De même, " quand les colonies auront entièrement cessé d'être sous la direction et la tutelle de l'autorité militaire, le service de santé de Montenotte devra être confié au médecin civil de Tenez, avec obligation de visites périodiques au moins trois fois par semaine (65) ", pour consultation à heure fixe. Enfin, si la colonie de Ponteba entre dans le régime civil et qu'un médecin civil d'Orléansville se charge du service médical du village, " dans ce cas seulement où le village serait sans médecin résident, il y aurait utilité à adjoindre aux religieuses qui doivent être chargées de l'école et de l'asile ainsi qu' une troisième sœur pour l'assistance des malades (66) ".

Plusieurs personnels soignants complètent en effet le dispositif médical dominé par les médecins de l'armée. D'après Paÿn, aucun pharmacien ne tentera de s'établir dans les villages " tant que tous les médicaments seront délivrés Gratuitement (67) ". Dans son rapport sur le service médical de Castiglione, l'inspecteur Loyer suggère la nécessité " d'attacher à la pharmacie un homme intelligent, colon ou autre, pour tenir ce local et seconder le médecin dans tout ce qui pourrait lui être confié (68) ", sans préciser toutefois la formation de cet homme. Il apparaît néanmoins que le véritable auxiliaire du médecin est la sœur de Charité, dont Olivier Faure a souligné la polyvalence et l'adaptation aux nouveaux besoins médicaux. Arrivées en Algérie au milieu des années 1830, ces religieuses voient leur présence progressivement se renforcer (Faure, 1999, 53-64 ; Dufourcq, 1993, 246 ; Langlois, 1984, 441-442 ; Hardiman, 2006).
Le service médical d'El-Afroun est ainsi fait par un chirugien aide-major et une sueur de Charité ; à Lodi, une des trois sœurs de Saint-Vincent qui s'occupent de l'école, donne aussi des soins aux malades, et à Boutlébi, Louis Cazalas estime nécessaire " de placer à demeure un chirurgien sous aide-major chargé de tout le service de la colonie, en lui donnant comme auxiliaire une sœur de charité et un infirmier (69) ". Plusieurs médecins demandent que des sœur hospitalières soient adjointes au personnel des colonies agricoles, avec pour mission de préparer les tisanes et agents médicamenteux ordinaires, de veiller les malades, leur administrer les remèdes, faire des pansements simples... Riboulet note en effet à propos de la sœur de Charité, qu'à force d'observer et de suivre le cours des maladies, " son intelligence devient médicale, discerne le développement et la marche des phénomènes morbides et sait rendre à l'officier de santé traitant le compte le plus exact des symptômes qui se sont déroulés pendant son absence (70) ". Michel Lévy regrette d'ailleurs que dans les trois hôpitaux civils de la province de Constantine, les religieuses " administrent, dépensent, manutentionnent ", et soient de ce fait détournées en partie " de leurs attributions essentielles qui les fixent au lit des malades (71) ". Chaque médecin reconnaît ce rôle fondamental et sollicite souvent la venue d'une de ces auxiliaires indispensables. Le personnel féminin comprend aussi des sages-femmes, une profession qui s'organise depuis la fin du XVIIIe siècle et dont la formation exige un savoir médical théorique et pratique " réel " (Gélis, 1988, 109-238 ; Beauvalet-Boutouyrie, 1999, 157-198). Le médecin en chef Lagrave demande en 1849 qu'une sage-femme soit attachée à chaque colonie (72) mais l'exercice de cette profession connaît néanmoins des contraintes nombreuses. Mialhes relève que dans une des colonies du cercle de Mostaganem, il y a " deux accoucheuses très capables mais elles ne possèdent point les instruments nécessaires qu'elles n'ont d'ailleurs pas le droit d'appliquer sans la présence d'un Docteur (73) ". Parfois, comme à Ponteba, " une sage femme sans diplôme a fait quelques accouchements pour lesquels elle reçoit de l'administration une somme fixe de 10 fr.(74) ". Dans l'ensemble, dans les villages, ce métier encadré et d'une utilité reconnue, est peu rémunérateur. Jean-Louis Rouis relate ainsi " la clientèle de M. Marquès, naguère complète sous tous les rapports, a fini par se dégarnir du jour où une dame de la colonie, Mme Bourgeois, a rapporté de Montpellier un brevet de sagefemme. Mme Bourgeois est aujourd'hui devenue la providence de ses compagnes qui, au moment de leurs couches, comme toutes les femmes possibles, ne se résignent qu'à grand'peine à se confier à un médecin. Il est regrettable que l'extrême pauvreté des colons rende son assistance extrêmement gratuite (75) ".

C'est pourquoi, à Mahelma, l'inspecteur Vaillant, ayant recueilli de bons renseignements sur la dame Sorel qui donne des soins éclairés aux femmes en couche, " sans être commissionnée par l'administration (76) ", propose qu'une légère rétribution lui soit accordée. La position de ces auxiliaires se stabilise ainsi progressivement et Dély-Ibrahim comme Kouba disposent d'une " sagefemme subventionnée " et Sidi-Chami d'un poste de sage-femme " rétribué (77) ".
Outre les soins aux malades et l'aide aux parturientes, on attend des sœurs de Charité et sages-femmes qu'elles inculquent l'hygiène aux jeunes et Rouis propose aussi de les affecter aux " crèches coloniales " qu'il suggère d'instituer (78).
Le médecin Duprat mentionne également une femme " infirmière à l'hôpital colonial de Cherchell " (Duprat, 1850, 12), sans que l'on en sache plus sur son statut et Rietschel qui se propose d'assigner un infirmier à chaque infirmerie estime qu'il serait " avantageux que ce fût une femme car elle pourrait donner ses soins aux deux sexes (79) ".
Un personnel relativement diversifié au sein duquel les figures principales restent, au milieu du XIXe siècle, le médecin militaire et la religieuse, s'emploient donc à apporter ses soins aux civils qui les reçoivent dans plusieurs lieux : chez eux, mais aussi dans des hôpitaux civils, installés dans les villes principales et qui reçoivent les malades pauvres ou encore dans les hôpitaux et ambulances militaires qui accueillent les malades indigents des villes secondaires, des centres de colonisation et des campagnes (ministère de la Guerre, 1853, 120 ; Hassendorfer, 1958, (78)). Une infirmerie est enfin censée être établie dans chacune des colonies agricoles de 1848. Selon Mialhes, les locaux consacrés aux soins sont encore, en 1849, très insuffisants. Les infirmeries, écrit-il, ne sont souvent " que des salles de secours (80) ". Les deux termes ne coïncident pas toujours : au Fondouck, où l'infirmerie a été fermée, il serait convenable d'installer une petite salle de secours de quelques lits, compte tenu de l'éloignement de tout hôpital (81), estime Vaillant.
Toutefois, sous la plume de certains médecins, " maison de secours " et " infirmerie " semblent recouvrir la même réalité : sur les treize villages que Joseph Goedorp inspecte en 1849, un seul dispose d'une infirmerie. Les maisons de secours à installer dans chaque point de colonisation sont soit encore à l'état de projet, soit bâties mais pas encore meublées (82). À Barral, l'infirmerie contient six lits et se compose de quatre pièces : " Une pour la pharmacie avec une cheminée pour les préparations pharmaceutiques, deux pour les malades et une pour l'infirmier ou garde malade " (Boyer, 1851, 42). Bien aérées, les salles sont cependant mal pavées et comme le toit n'est pas encore plafonné, l'eau goutte à l'intérieur. D'autres infirmeries peuvent être plus importantes : Goze estime nécessaire d'en établir une à Marengo de 12 à 15 lits (83). Dans les trois villages que visite Rietschel en 1849, une maison entière est affectée à l'infirmerie, dans laquelle d'ailleurs, " la séparation entre hommes et femmes n'est pas assez marquée (84) ".

Certaines de ces structures ont été établies dans l'urgence. Ainsi, à Montenotte, une infirmerie provisoire a été installée en 1850 en période d'épidémie, " pour porter des secours prompts à des maladies à marche rapide (85) ". Face au choléra de 1849, pour édifier plus rapidement un hôpital à Marengo, le Génie aurait utilisé les pierres déjà taillées des ruines romaines du secteur (Bel, 1997, 127). L'utilité de ces locaux, sur laquelle les médecins de l'armée doivent se prononcer, est cependant " diversement appréciée (86) ". L'existence d'une infirmerie dépend le plus souvent de la proximité d'un hôpital. Vaillant conseille ainsi la suppression de l'infirmerie à Lodi, puisque l'hôpital de Médéah est à une courte distance (87). Cela ne signifie pas pour autant priver un village de soins. Si à Ameur-el-Aïn, les 120 habitants n'ont pas d'infirmerie, Laveran demande néanmoins la présence d'une sœur de Charité. En revanche, Louis Cazalas écrit qu'" en raison de son éloignement d'Oran, de l'importance qu'il nous semble susceptible d'acquérir et du nombre exceptionnel de malades qu'il faut s'attendre à y voir la première année, nous croyons très utile de créer une infirmerie à Boutlébi au moment de l'arrivée de colons (88) ". Pour des questions démographiques également, Michel Lévy propose quant à lui d'élever l'infirmerie de Jemmapes au rang de petit hôpital (89). Il arrive enfin qu'un même village dispose de plus d'un lieu de soins, comme à Marengo où le poste médical est tenu par le médecin Guéret et la petite infirmerie par des sœurs (90). Dans l'ensemble toutefois, c'est la suppression de plusieurs infirmeries qui est conseillée et Vaillant estime inutile l'agrandissement de l'infirmerie de Zurich " qui ne sert déjà pas à grandchose (91) ". On viendrait mieux au secours des colons en organisant des secours à domicile et, souligne Mialhes, on gagnerait un local utilisable pour installer l'école (92). À Montenotte, la maison de l'infirmerie est finalement donnée à un colon et une petite pharmacie est organisée dans l'ancienne infirmerie du Fondouck, " convertie en partie en chapelle et en partie en habitation pour les trois sœurs de Saint-Vincent (93) ". S'il reste indispensable de réserver dans chaque village, comme le propose Riboulet, " deux pièces affectées au service de santé ; l'une qui sera en même temps la salle de visite et la pharmacie, l'autre qui servira de logement au médecin (94) ", les soins à domicile doivent constituer la base sanitaire des colonies.

Estimant que les hôpitaux et infirmeries " ne sont jamais que des asiles ouverts au malheur ", Rouis juge nécessaire de prendre en compte " cet esprit spécial aux gens qui ont appris de bonne heure à se soigner chez eux qui contribue à éloigner ces habitants des maisons hospitalières ". Il rappelle que c'est uniquement le défaut d'installation convenable qui a amené les colons à accepter une place à l'hôpital, " et encore, pour les y déterminer, fallait-il vaincre une foule de répugnances, surtout de la part des femmes et des enfants (95) ". Les réticences à se faire soigner à l'extérieur sont à mettre sur le compte de la pudeur : dans l'infirmerie de Barral, les femmes sont obligées de passer par la pièce des hommes. Aussi une seule est-elle venue s'y faire traiter " alors qu'il n'y avait personne d'autre " (Boyer, 1851, 42). Mais les lieux collectifs de soins, particulièrement l'hôpital, provoquent surtout la crainte : un jeune soldat explique par exemple en 1852 à ses parents combien " ces maisons lui font peur : il y a trop de malades et il lui semble sans cesse au-dessus de ces rangs de lits dans ces longues salles sombres voir l'oiseau de la mort qui plane en silence et attend le moment de vous enlever " (Michel, 1994, 161). À Coléah, en 1851, " l'immense majorité des malades se refuse péremptoirement à être traités hors de chez eux (96) " et l'hôpital est réservé aux célibataires et aux porteurs de maladies honteuses ou incurables. L'avantage de ce système de soins à domicile, selon Rouis, permet en outre à l'administration de réaliser des économies en limitant les entrées à l'hôpital. Rares sont finalement les médecins favorables à l'hospitalisation, comme Laveran qui juge préférable d'envoyer les malades à l'hôpital pour les soustraire à " l'influence du miasme " qui les a frappés (97).

Quant à Barudel, il voit la possibilité d'envoi des malades à l'hôpital comme un moyen coercitif davantage que sanitaire : en recommandant aux médecins de traiter à domicile le plus grand nombre de malades, " pour leur éviter les ennuis de l'hôpital et ne pas les priver de la vue de leurs familles, ils ignoraient qu'ils [les officiers de santé en chef] nous privaient du seul moyen qui restait à notre disposition, la peur de l'hôpital (98) ". Cependant, lorsqu'il est question de supprimer l'hôpital militaire de Koléah, Sierzputowski appelle à la création d'un établissement civil car le district, " devant être augmenté de deux villages de la commune de Castiglione et des deux en voie de création à Chaïba, donnera, outre une nombreuse population flottante, un effectif tel qu'il sera impossible de laisser ce district sans hôpital (99) ".
De fait, de nombreux médecins considèrent que le passage au régime civil risque de désorganiser les soins hospitaliers. Selon Michel Lévy, si les colonies agricoles sont " dépossédées de la bienfaisante tutelle du ministre de la Guerre, les hôpitaux civils de Bône et de Philippeville ne suffiront pas au traitement des femmes et des enfants malades ". Pour l'inspecteur, " les hôpitaux civils en Algérie ne sont en réalité et ne seront bien longtemps que des succursales des hôpitaux militaires à la charge du ministère de la Guerre (100) ". Vaillant souligne d'ailleurs que l'hôpital de Douéra, est en fait " l'hôpital militaire, cédé avec tout son matériel à l'administration civile (101) ", où le service médical s'effectue selon le règlement des hôpitaux militaires de 1831. Lévy estime donc que l'adaptation des hôpitaux civils au traitement des deux sexes ne pourra se faire que lentement et au moyen de grosses dépenses. Cette situation continuera de morceler encore longtemps le traitement des malades civils et " d'y faire concourir deux ordres de médecins ", les uns militaires, les autres civils (102). Aussi propose-t-il d'appliquer aux hôpitaux civils le mode de gestion et de contrôle des établissements militaires.

LE DÉROULEMENT DES SOINS

Outre la mise en place d'un cadre matériel et humain, les rapports des officiers de santé précisent la manière dont les médecins organisent leur service médical, la fréquence des visites et la manière dont elles se déroulent, éclairant un pan de l'histoire complexe de la médicalisation des populations au XIXe siècle (Faure, 1998, 53-68 ; Rieder, 2003, 260-271). Dans les colonies de la province d'Alger par exemple, " chaque jour avant la distribution des aliments, le tambour bat la visite des malades à 7 h. ", visite qui dure jusqu'à 9 h. Sont invités à s'y rendre les colons " dès qu'ils sont atteints de la plus légère indisposition (103) ". L'affluence est parfois telle que deux heures ne suffisent pas toujours pour interroger les malades. Dans l'ensemble, les consultations ont lieu à l'infirmerie ou dans la " maison de secours ", parfois dans un autre local, comme à Montenotte, où elles se déroulent dans la pharmacie (104). À La Ferme cependant, Rietschel relève qu'aucun local n'est affecté aux consultations (105).
Deux ans plus tard, le même médecin décrivant la même colonie indique qu'en son centre se trouvent quatre maisons doubles et deux simples affectées à des services publics : église, presbytère, école, mairie, maison du Docteur (106), parfois trop petite. À Marengo, le directeur propose ainsi au médecin de s'installer dans une seule pièce de 3m 50, " comme s'il était possible d'interroger et de visiter femmes, enfants, adultes dans une pièce unique où affluent chaque matin les malades (107) ", proteste Barudel.
Après cette séance de consultations, le médecin effectue, normalement entre 9 heures et 10 heures, des visites à domicile chez ceux dont les parents ont laissé le nom à la visite du matin, et chez les malades déjà en traitement. En début d'après-midi, de 13 heures à 14 heures, il se livre à la distribution des médicaments.
La fin de la journée est consacrée aux contre-visites chez les colons atteints de maladies graves. Le service de santé fonctionne sur ces bases tant qu'il y a peu de malades mais en période de fièvres, souligne Lagrave, " ces pérégrinations se renouvelant vingt fois par jour, chaque fois que l'officier de santé était demandé par un nouveau malade, il en résultait pour le malheureux chirurgien un service forcé qui dépassait de beaucoup les forces humaines (108) ".

De façon générale, les rapports médicaux pointent la pauvreté de l'équipement médical des colonies. Loyer demande une boîte pour l'extraction des dents et Mialhes réclame des instruments de chirurgie, surtout un forceps et un spéculum (109). Rouis, qui se félicite de les avoir obtenus, cherche alors à se procurer une seringue, un clysopompe et une baignoire portative (110). Les médicaments sont fournis gratuitement dans les colonies et à Montenotte, " une pharmacie disposée sur des rayons dans l'une des deux chambres du logement du médecin suffit à la plupart des besoins (111) ". D'ailleurs, ce que l'inspecteur Riboulet appelle l'art de guérir dans les colonies consiste à " simplifier autant que possible la médication et à se borner à l'emploi de quelques remèdes dont l'action est sûre et sanctionnée par l'expérience (112) ".
Cette réflexion pourrait être l'illustration d'un intérêt moindre pour des patients civils constituant une clientèle non solvable, ainsi que l'expression d'une médecine de masse limitée par la faiblesse des moyens et des personnels. Face aux épidémies, ces derniers font de toute façon défaut et lors du choléra de 1849, " à bout de science et de remèdes, certains médecins-majors […] ne trouvèrent rien de mieux que d'ordonner aux habitants de Barral de danser " afin que le sang circule mieux (Rasteil, 1930, 60). Lorsqu'un médicament manque, il est obtenu " sur bon " à l'hôpital voisin. Celui de Ténès par exemple distribue des sangsues, " toutes les fois qu'il n'a pas été possible de se les procurer sur les lieux, soit au marché arabe, soit directement dans quelque ruisseau voisin (113) ". Outre les visites et contre-visites, le médecin tente de vacciner les populations qui ne le sont pas encore. Avec un succès limité : en 1849, Imbert doit ainsi se procurer du nouveau vaccin après les premières tentatives d'inoculation (114).

Les vaccinations, " pratiquées avec des vaccins recueillis sur des plaques ou dans des tubes " n'ayant réussi nulle part, Mialhes recommande " à tous les médecins des colonies de les recommencer avec des vaccins pris de bras à bras (115) ". Le médecin militaire dispense aussi régulièrement des conseils hygiéniques à la population, comme ceux que le Conseil de l'armée rédige en 1847 (116). Colman, chargé du service de la colonie et du camp d'Aïn Regador, répand ainsi de sages conseils hygiéniques, " soit de personne à personne, lorsqu'il aperçoit quelque infraction aux règles de la santé, soit par des interventions écrites et adressées à tous (117) ".
En plus des tâches à accomplir et de l'environnement matériel dans lequel elles se déroulent, les rapports laissent aussi entrevoir la manière dont se construit la relation entre le médecin et son patient. Le médecin de colonisation Paÿn se plaint notamment des " débats incessants entre le colon et le médecin ". Sachant qu'un médecin salarié par le gouvernement doit visiter les malades du village, " le colon, persuadé qu'il doit être traité, médicamenté gratuitement, pousse l'exagération jusqu'à faire du médecin son garde malade, son infirmier […] ; il abusera tant qu'il pourra parce qu'il croit n'avoir rien à payer. S'armant de la menace d'une plainte, il exigera deux ou trois visites par jour ; dans chaque village chacun croit avoir droit au médecin, comme aux médicaments, aux distributions de grains, de bœufs, d'arbres (118) ".

Cette attitude face au médecin fonctionnaire se retrouverait en ville où même les quelques habitants suffisamment aisés pour payer des honoraires au médecin s'y résigneraient difficilement " parce qu'ils regardent comme un droit le traitement gratuit par un médecin stipendié (119) ". En même temps, Vaillant remarque qu'à Cherchell, comme à Tenes, " un grand nombre d'habitants, pour éviter l'achat de médicaments, entrent à l'hôpital (120) " et Juzanx, dans la colonie de Montenotte, se plaint " des préjugés en vertu desquels ils demandent trop souvent les premiers secours à des remèdes spécifiques, de leurs exigences au sujet des médicaments dont ils voudraient faire provision pour plusieurs jours (121) ". La demande de médicaments ne concerne d'ailleurs pas que les patients européens et, relève Sierzputowski, " depuis qu'on n'accorde pas aussi largement par motifs d'économie des médicaments gratuits aux indigènes, les traitements à domicile ont pour ainsi dire disparu (122) ". Vaillant remarque aussi la manière dont les musulmans peuvent se révéler réceptifs à l'offre médicale quand il écrit que le voisinage d'un grand marché arabe met en rapport " le malade indigène avec le médecin et les sœurs de Charité du Fondouck offrant leurs conseils et leurs soins, qui sont recherchés et qui ont des résultats utiles (123) ", sauf pour les vaccinations (Turin, 1971).
La demande de soins et des médicaments témoigne de ce rapport complexe qu'entretiennent le médecin et le malade au remède (Faure, 1993, 216-225 ; Bonah et Rasmussen, 2005). Les normes sanitaires que les médecins cherchent à introduire révèlent les tensions inhérentes au processus de médicalisation, qui s'ajoutent aux relations souvent difficiles qu'entretiennent civils et militaires en Algérie.
Les rapports mentionnent " la négligence des colons à observer les règles d'hygiène (124) " et Barudel déplore, quant à lui, l'indiscipline chez des clients qualifiés " d'intraitables " dans tous les sens du terme. Il se plaint de " l'indocilité des malades […] leurs excès, leurs fraudes, leur indifférence pour les prescriptions médicales qui leur étaient faites (125) " amenant des " conséquences fatales ". À Montenotte, Juzanx, lors de ses consultations dans les colonies, " fait autant que possible prendre devant lui les remèdes actifs et désagréables (126) " afin de veiller au respect de ses instructions, tandis que Barudel indique les écarts de régime alimentaire, voire des " ivresses " alors qu'il tente de traiter des dysenteries. D'autres refusent de se rendre à l'hôpital de Blidah, comme le médecin l'a ordonné. Il décrit donc " tout ce qu'il y a d'indocile, d'inflexible dans quelques-unes de ces natures vicieuses dont la santé nous est confiée (127) ". Ce vocabulaire souligne les relations visiblement déplorables que Barudel a entretenues avec sa clientèle forcée, pour des raisons certainement personnelles mais peut-être aussi liées au mépris que le militaire, habitué à être obéi dans le cadre d'une médecine de masse, éprouve pour le civil, lui-même peu enclin à supporter " l'arbitraire militaire " qui règnerait dans les colonies (Julien, 1964, 371, 308). Son récit indique enfin une volonté de sanctionner les contrevenants sans arriver à " obtenir la plus légère punition contre ces récalcitrants d'un genre tout nouveau ", par exemple à obtenir " que les vivres fussent retranchés à ceux qu'il traitait (128) ". Ces tensions peuvent témoigner de l'opposition des civils à un " régime du sabre " qui étend alors son influence sur l'ensemble du territoire algérien mais montrent également comment le médecin, considéré comme étant au service d'une population coloniale, essaye parfois d'user de son statut de militaire pour imposer les contraintes liées à l'exercice de son métier. Celui-ci se heurte non seulement au civil mais aussi au militaire, le directeur des colonies faisant partie de l'armée.

Charles-André Julien décrit le " délaissement " des colons de 1848 par l'armée et y pressent une manœuvre des autorités militaires " pour condamner à l'échec, pour des raisons politiques, la colonisation ouvrière " (Julien, 1964, 367-369). Le service de Santé aux armées est cependant crédité en 1850 d'avoir " exercé une part incontestable d'influence sur la mortalité et les progrès(129) " de ces établissements.
Intégrées dans un réseau sanitaire composé de plusieurs types de structures et de personnels médicaux, les colonies agricoles de la IIe République sont un exemple de la manière dont l'armée a pu jouer un rôle majeur dans la colonisation en cherchant à protéger la santé des populations coloniales, dont la survie est essentielle à la mise en place d'une colonie de peuplement. Dans un contexte de pénurie relative, de contraintes nombreuses notamment financières, les rapports des médecins de l'armée esquissent le paysage sanitaire en train de naître en Algérie, au sein duquel domine la médecine militaire. Cette dernière peut se montrer brutale ; elle est surtout le plus souvent impuissante face à la maladie.
Elle propose néanmoins un encadrement médical effectif qui cherche, autant que faire se peut, à fournir un service aussi proche que possible de celui qui prévaut alors dans la société civile, en étant soucieux des pudeurs et des répugnances pouvant exister vis-à-vis des hôpitaux (130).
Diversement acceptée, cette médicalisation montre comment l'armée tente d'affirmer son emprise sur un territoire et une population par l'imposition de soins curatifs et préventifs, mais également la façon dont se produit la rencontre d'une offre médicale diversifiée et d'une demande médicale non moins complexe, qui, si elles ne s'accordent pas toujours sur la forme, correspondent sur le fond.
Claire FREDJ Université François Rabelais Tours
http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=ADH_113_0127
claire.fredj@wanadoo.fr

Effectifs du Service de santé des Armées
Année Médecin et chirurgien inspecteur Médecin et chirurgien principal de 1re et 2e classe Médecin ordinaire de 1re et 2e classe Chirurgien major de 1re et 2e classe Médecin adjoint Chirurgien aide-major de 1re et 2e classe Sous aide Total (y compris les pharmaciens)
1836 4 21 53 233 24 374 410 1213
1841 4 (2+2) 38 (14+24) 46 249 45 402 460 1377
Médecin inspecteur Principal de 1re classe Principal de 2e classe Major de 1re classe Major de 1re classe Major de 2e classe Aide-major de 1re classe Aide major de 2e classe Total (y compris les pharmaciens)
1852 7 40 40 100 200 340 340 1226

NOTES
1. Sur cet épisode existent quelques témoignages, voir Maxime Rasteil, À l’aube de l’Algérie française. Le calvaire des colons de 1848, Paris, E. Figuière, 1930 ; Louis Reybaud, Rapport présenté au ministre de la Guerre par la commission d’inspection des colonies agricoles de l’Algérie, le 16 novembre 1849, Paris, Imprimerie nationale, 1849. Plusieurs monographies de villages de colonisation ont également été publiées, par exemple : Victor-Élie Dejardins, Cent ans d’effort français à Assi-Bounif, Oran, H. Chazaud, 1948 ; Id. , Un siècle de colonisation à Rivoli 1848-1948, Oran, H. Chazaud ; Paul Garcia, Saint-Louis, village oranien (1848-1948), Oran, Heintz, 1949 ; S. Fontanilles, Colonies agricoles. Saint- Cloud, Oran, Fouques et Cie, 1896 ; Hildebert Isnard et Henri Roseau, Comité départemental d'Alger pour la célébration du centenaire de la Révolution de 1848 en Algérie, Alger, A. Joyeux, 1950 ; Francis Llabador, Nemours, Djemâa-Ghazaouât, monographie, Alger, J. Carbonel, 1948 ; Robert Tinthoin, Assi-ben-Okba, un village de Parisiens de 1848, Oran, Heintz, 1949. Des études générales sur cette population ont également été réalisées, notamment Maurice Bel, Les colonies agricoles en 1848, chez l’auteur, Nice, 1997 ; Marcel Emerit (dir.), La révolution de 1848 en Algérie, Paris, Larose, 1949 ; Charles-André Julien, Histoire de l’Algérie contemporaine, t. I, Paris, PUF, 1964, p. 364-375, Yvette Katan, « Les colons de 1848 en Algérie : mythes et réalités », RHMC, n° XXXI, avril-juin 1984, p. 177-202.
2. Les colonies créées par la loi du 19 septembre 1848 sont : 1) dans le département d’Alger : El Afroun, Bou-Roumi, Marengo, Zurich, Novi, Castiglione Tefschoun, Lodi, Damiette, Montenotte, Ponteba, La Ferme ; 2) dans le département d’Oran : Aboukir, Rivoli, Aïn Nouissy, Tounin, Karouba, Aïn-Tedeles, Souk-el-Mitou, Saint-Leu, Damesme, Arzew, Mouley-Magoun, Kléber, Mefessour, Saint-Cloud, Fleurus, Assi- Ammeur, Assi-ben-Fereah, Saint-Louis, Assi-ben- Okba, Assi-bou-Nif, Mangin ; 3) dans le département de Constantine : Jemmapes, Gastonville, Robertville, Heliopolis, Guelma, Millesimo, Petit, Mondovi, Barral.
3. AVdG 70/34, N.-F.-G. Rietschel, Rapport médical sur les colonies agricoles de La Ferme, Ponteba et Montenotte, inspection de 1849, 4 août 1849, p. 40.
4. Ibid., p. 24.
5. AVdG 70/12, J.-F. Mialhes, Inspection des colonies agricoles de la circonscription de Mostaganem, 1849, p. 7.
6. AVdG 70/38, Michel Levy, Inspection médicale, service civil, Province de Constantine, Marseille, 14 novembre 1851, p. 3.
7. AVdG 70/35, Antoine-Paul Vaillant, Inspection de la colonie agricole de Ponteba, 20 octobre 1851.
8. AVdG 70/26, Jean-Louis Rouis, Rapport sur l’inspection médicale faite dans la colonie de Castiglione et annexe pour l’année 1851, au Conseil de santé, 13 août 1851, p. 6 ; AVdG 70/30, Louis Laveran, Rapport sur l’inspection médicale des colonies et des dépendances agricoles de l’Afroun et de Marengo, 11 août 1851 ; ce n’est qu’après 1856 que la mortalité commence à baisser rapidement dans la population européenne, voir Kateb, 2001, 33.
9. AVdG 70/2, Ferdinand Quesnoy, Conseils hygiéniques aux cultivateurs en Algérie, 1849, p. 55.
10. Ibid., p. 2.
11. AVdG 70/11 bis, Les officiers de santé en chef de l’armée, Résumé des observations des médecins inspecteurs des colonies agricoles, Alger, le 31 octobre 1849, p. 2.
12. Ibid, p. 4.
13. AVdG 70/14, Louis Cazalas, Rapport sur l’inspection médicale des colonies agricoles de la division d’Oran en 1851, 1851, p. 15.
14. AVdG 70/4, Ernest Vezien, De l’influence des maladies de l’Algérie sur la colonisation et des moyens de les combattre, 1856.
15. AVdG 70/43, Hippolyte Lagrave, Rapport adressé à M. l’Intendant militaire de l’Armée d’Afrique par M. Lagrave, médecin en chef de l’hôpital militaire de Philippeville, chargé de l’inspection médicale des colonies agricoles de Jemmapes, Gastonville et de Robertville, 14 août 1849, p. 13.
16. AVdG 70/30, Laveran, op. cit.
17. AVdG 70/26, Loyer, Inspection médicale des colonies agricoles d’El Afroun et Castiglione, 2 juillet 1849, p. 3.
18. AVdG 70/11 bis, Les officiers de santé en chef de l’armée, Résumé…, op. cit., p. 7.
19. AVdG 70/26, Loyer, op. cit., p. 5.
20. AVdG 70/33, Eugène Goze, Rapport d’inspection médicale des colonies agricoles de Novi et Zurich, 18 août 1851.
21. AVdG 70/11 bis, Les officiers de santé en chef de l’armée, Résumé…, op. cit., p. 9.
22. Loi relative à l’emploi du crédit de 5 M. ouvert par la loi du 19 mai 1849 pour les colonies agricoles de l’Algérie, Bulletin des lois de la République française, Xe série, tome VI, 2e semestre 1850, p. 174.
23. AVdG 70/2, Quesnoy, , op. cit., p. 19.
24. AVdG 70/4, Vezien, op. cit.
25. AVdG 70/2, Quesnoy, op. cit., p. 51.
26. AVdG 70/34, N.-F.-G. Rietschel, Rapport sur l’inspection médicale de la colonie de Montenotte, août 1851, 26 août 1851. À partir de 1880, les taux de croissance de la population européenne en Algérie supérieurs à ceux de la métropole amènent René Ricoux à y voir « les preuves non équivoques de sa vitalité, de son adaptation sur le sol algérien », René Ricoux, La démographie figurée de l’Algérie. Étude statistique des populations européennes qui habitent l’Algérie, Paris, G. Masson, 1880, p. 219.
27. AVdG 70/27, Marcel Sierzputowski, Documents statistiques médicaux pour le district de Koléah depuis l’an 1844 jusqu’au 31 octobre 1851, complets pour les villages civils, y compris les colonies suisses, 10 décembre 1851.
28. AVdG 70/1, A. Payn, Nécessité d’un règlement pour le service de santé dans les villages, 1849.
29. AVdG 70/4, Vezien, op. cit.
30. AVdG 70/1, Payn, op. cit.
31. Les statistiques officielles indiquent ainsi pour les praticiens civils 62 docteurs en médecine et 23 officiers de santé. Plus du tiers pratique à Alger. Sur la répartition des personnels médicaux civils sur le territoire de la colonie, cf. Artus Mayeux, Annuaire de l’Algérie (administratif, militaire, commercial, statistique et agricole) pour 1850, Alger, chez Bernard, 1850 et Jules Duval, Tableau de l’Algérie. Annuaire descriptif et statistique de la colonie pour 1854, Paris, Just Rouvier, 1854.
32. Voir aussi Regards sur la France. Le service de santé des armées en Algérie, 1830-1958, 2e année, n °7, octobre-novembre 1958, p. 75-95, p. 81.
33. AVdG 70/25, Joseph Barudel, Rapport sur les colonies agricoles de la province d’Alger, adressé au Conseil de santé des armées, 20 juin 1850.
34. AVdG 70/52, Rapport au ministre sur la situation du personnel en Algérie, novembre 1850.
35. AVdG 70/25, Barudel, op. cit.
36. AVdG 70/26, Rouis, op. cit., p. 9.
37. AVdG 70/12, Mialhes, op. cit., p. 19.
38. Cadre des médecins de l’Armée (1836-1852). L’année 1852 voit la réorganisation du service de santé par la fusion des professions de médecins et de chirurgiens. (voir tableau)
39. AVdG 70/32, Eugène Goze, Rapport d’inspection médicale des colonies agricoles de Marengo, Zurich et Novi, 30 juillet 1849, p. 7.
40. AVdG 70/43, Lagrave, , op. cit., p. 50.
41. AVdG 70/32, Goze, Rapport [1849], p. 8.
42. AVdG 70/35, Vaillant, Inspection [20 octobre 1851], op. cit.
43. AVdG 70/1, Payn, op. cit. Sur les débuts de la médecine de colonisation en Algérie, définitivement instituée par l’arrêté municipal du
21 janvier 1853, voir Benjamin Milliot, La médecine de colonisation en Algérie, Bône, imp. du Courrier de Bône, 1893.
44. AVdG 70/8, s. n., s. d.
45. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection médicale du département d’Alger, service médical civil de Milianah, 24 octobre 1851.
46. Le décret du 12 juillet 1851 rend exécutoires en Algérie les lois sur l’exercice de la médecine et de la chirurgie. Ainsi, « les médecins et chirurgiens gradués par les universités étrangères, les officiers de santé et les sages-femmes reçus par les jurys médicaux de France ne peuvent exercer en Algérie qu’en vertu d’une autorisation spéciale du ministre de la guerre », ministère de la Guerre, 1853, 120. Voir les listes dressées en application de ce texte, AN F/17/4556².
47. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection médicale du département d’Alger, Service médical rural, 7 octobre 1851.
48. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection médicale du département d’Alger, service médical civil de Ténès, 21 octobre 1851.
49. AVdG 70/29, Vaillant, Inspection médicale du Fondouck, 30 septembre 1851.
50. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection médicale du département d’Alger, service médical civil de Bouffarick, 2 octobre 1851.
51. AVdG 70/38, Levy, op. cit., p. 8.
52. Ibid., p. 12.53. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection [2 octobre 1851], op. cit.
53. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection [2 octobre 1851], op. cit.
54. AVdG 70/38, Levy, op. cit., p. 8.
55. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection médicale du département d’Alger, service médical civil rural, 2e circonscription du Sahel d’Alger, 30 septembre 1851.
56. Ibid.
57. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection médicale du département d’Alger, service médical civil de Coléah, 1er octobre 1851.
58. Revue du progrès de l’Algérie, Bulletin officiel des travaux de la Société de Médecine d’Alger, de la Société pour l’extinction du paupérisme par la colonisation de l’Algérie, des Comices agricoles et autres Sociétés scientifiques, théoriques et pratiques de la Colonie, n° 1-2, janvier-février 1850, 2, rue des Sauterelles, 1850, n° 1-2, janvier-février 1850, p. 13.
59. AVdG 70/38, Levy, op. cit., p. 9.
60. AVdG 70/33, Vaiullant, Inspection médicale de la colonie de Zurich, 26 octobre 1851.
61. AVdG 70/32, GOZE, Rapport [1849], p. 17. 62. Après le coup d’État, Saint-Arnaud fait accorder des crédits aux colonies jusqu’en janvier 1853 (voir Julien, 1964, 374).
63. Ibid., p. 17.
64. AVdG 70/26, Vaillant, Inspection des colonies de Lodi et Damiette, 9 octobre 1851.
65. AVdG 70/34, Vaillant, Inspection sur la colonie agricole de Montenotte, 22 octobre 1851.
66. AVdG 70/35, Vaillant, Inspection [20 octobre 1851].
67. AVdG 70/1, Payn, op. cit. ; AVdG 70/37, Vaillant, Inspection [30 septembre 1851], op. cit.
68. AVdG 70/26, Loyer, op. cit., p. 13.
69. AVdG 70/30, Laveran, Rapport, op. cit. ; AVdG 70/26, Vaillant, Inspection [9 octobre 1851], op. cit. ; AVdG 70/14, Cazalas, op. cit., p.5.
70. AVdG 70/40, Nicolas Riboulet, Rapport sur le service médical et l’état sanitaire des centres agricoles de la subdivision de Bône, juillet 1851.
71. AVdG 70/38, Levy, op. cit., p. 5.
72. AVdG 70/43, Lagrave, op. cit., p. 50.
73. AVdG 70/12, Mialhes, op. cit., p. 21.
74. AVdG 70/35, Vaillant, Inspection [20 octobre 1851], op. cit.
75. AVdG 70/26, Rouis, op. cit., p. 6.
76. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection [2 octobre 1851], op. cit.
77. AVdG 70/11, Circonscriptions du territoire civil. Indication des villages ayant un médecin civil stipendié.
78. AVdG 70/26, Rouis, op. cit., p. 20.
79. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1851], op. cit., p. 8.
80. AVdG 70/12, Mialhes, op. cit., p. 22.
81. AVdG 70/29, Vaillant, Inspection [30 septembre 1851], op. cit.
82. AVdG 70/13, Joseph Goedorp, Rapport d’inspection, 1849, p. 7.
83. AVdG 70/32, Goze, Rapport [1849], op. cit., p. 17.
84. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1849], op. cit., p. 7.
85. AVdG 70/34, Vaillant, Inspection [22 octobre 1851], op. cit.
86. AVdG 70/13, Goedorp, op. cit., p. 7.
87. AVdG 70/26, Vaillant, Inspection [9 octobre 1851], op. cit.
88. AVdG 70/14, Cazalas, op. cit., p. 5.
89. AVdG 70/38, Levy, op. cit., p. 18.
90. AVdG 70/30, Laveran, op. cit.
91. AVdG 70/33, Vaillant, Inspection [26 octobre 1851], op. cit.
92. AVdG 70/12, Mialhes, op. cit., p. 22.
93. AVdG 70/34, Rietschel Rapport [1851], op. cit. ; AVdG 70/29, Vaillant, VAILLANT, Inspection [30 septembre 1851].
94. AVdG 70/40, Riboulet, op. cit.
95. AVdG 70/26, Rouis, op. cit., p. 12.
96. Ibid., p. 7.
97. AVdG 70/30, Laveran, op. cit.
98. AVdG 70/25, Barudel, op. cit.
99. AVdG 70/27, Sierzputowski, op. cit.
100. AVdG 70/38, Levy, op. cit., p. 5-6.
101 AVdG 70/37, Vaillant, Inspection [30 septembre 1851], op. cit.
102. AVdG 70/38, Levy, op. cit., p. 5.
103. AVdG 70/25, Barudel, op. cit.
104. AVdG 70/34, Rietschel Rietschel, Rapport [1849], op cit., p. 56.
105. Ibid., p. 24.
106. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1851], op. cit.
107. AVdG 70/25, Barudel, op. cit.
108. AVdG 70/43, Lagrave, op. cit., p. 21.
109. AVdG 70/26, Loyer, op. cit., p. 10.
110. AVdG 70/26, Rouis, op. cit., p. 8.
111. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1851], op. cit.
112. AVdG 70/40, Riboulet, op. cit.
113. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1851], op. cit. Dans les villes, les médicaments sont donnés gratuitement aux indigents inscrits et délivrés sur bons signés du commissaire civil, par un pharmacien adjudicataire qui exécute les prescriptions.
114. AVdG 70/12, Imbert, Colonie agricole de Kharouba, Registre d’inspection des malades, 7 juillet 1849.
115. AVdG 70/12, Mialhes, op. cit., p. 23.
116. AVdG 70/47, Note pour le Conseil de santé des armées, Instruction hygiénique pour les colons récemment arrivés en Algérie, Paris, le 9 janvier 1847.
117. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1849], op. cit., p. 57.
118. AVdG 70/1, Payn, op. cit.
119. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection [21 octobre 1851], op. cit.
120. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection médicale du département d’Alger, service médical civil de Cherchell, 28 octobre 1851.
121. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1851], op. cit.
122. AVdG 70/27, Sierzputowski, op. cit.
123. AVdG 70/29, Vaillant, Inspection [30 septembre 1851], op. cit.
124. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1851], op. cit.
125. AVdG 70/25, Barudel, op. cit.
126. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1851], op. cit.
127. AVdG 70/25, Barudel, op. cit.
128. Ibid.
129. AVdG 70/52, Rapport au ministre sur la situation du personnel en Algérie, novembre 1850.

Carte 1 Carte générale de l’Algérie

Carte 2 Département d’Oran

Les points les plus gros : villes principales citées dans le texte
Les points plus petits avec les noms soulignés : colonies agricoles fondées en 1848 ;
les noms non soulignés : autres points de colonisation.

Carte 3 Département d’Alger

Carte 4 Département de Constantine

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Mis en ligne le 20 avril 2013